
4 Octobre 1945, une poignée d’irréductibles gaulois pense à une idée que bien d’autres pays qualifieraient encore aujourd’hui de folle ou farfelue.
La Sécurité sociale naît d’une volonté : celui de garantir à chacun, qu’en toutes circonstances, il disposera des moyens nécessaires pour assurer sa subsistance et celle de sa famille dans des conditions décentes (Ordonnance n° 45-2250 du 4 octobre 1945 portant organisation de la Sécurité sociale).
En d’autres termes, prévenir et garantir tous les risques de la vie quotidienne (risques professionnels, maladie, maternité…) et limiter les risques de précarité ou de désinsertion dans les différentes étapes de nos vies.
Cette idée d’universalité de la solidarité a été le fil conducteur de la «Sécurité sociale » depuis sa création et perdure encore aujourd’hui malgré les réformes, les changements d’orientations, et la modernisation de la mission de ses différentes composantes.
Depuis 70 ans, la Sécurité sociale s’est renouvelée, s’est modernisée, s’est adaptée aux mœurs, aux changements sociétaux tout en gardant sa mission de service public, malgré les difficultés et les nouveaux défis imposés par les aléas de société.
Mais depuis quelques années, cette mission de service public souffre d’une image injustement dépréciée, sous couvert de difficultés pour les organismes d’assumer la charge croissante de travail. C’est vrai pour les Caisses Primaires d’Assurance Maladie en général et bien plus encore pour celle de Haute-Savoie où s’ajoutent les problèmes liés à l’attractivité des salaires, freinant les recrutements dans un contexte de concurrence helvétique.
Pour autant, cette particularité liée au marché du travail, ne doit pas cacher un malaise plus profond sur le fait que la majorité des embauches s’effectuent sous la forme de CDD et d’intérims. Plombée par le dictat des chiffres, la production horaire, l’économie sur les coûts de personnel, et la RMPP (rémunération moyenne du personnel en place). Une logique de rationalisation et d’économies qui ne parle à personne d’autre qu’à ceux qui pensent encore que l’Assurance Maladie a bien suffisamment d’agents pour traiter l’ensemble des demandes de tous nos clients. Pour toutes ses missions, la Caisse Primaire d’Assurance Maladie a de plus en plus recours « aux ressources non pérennes ».
Avec la valse des départs et arrivées liées au « non pérenne », les services sont confrontés à une demande croissante de formations au galop pour démarrer une production forcenée, sacrifiant par la même, une partie de la qualité au profit de la quantité traitée. Et pour ceux qui n’apprendraient pas assez vite ? Une période d’essai non concluante fera l’affaire… Pour ceux qui pourront suivre la cadence, un éventuel renouvellement de contrat avant un gentil message pour dire qu’il est temps de regarder ailleurs…
Quand viendra le temps où le travail de technicien, de conseiller assurance maladie, de téléconseiller ou d’agent tracing nécessitera si peu d’expertise que seul des contrats précaires pourront l’assurer ?
Il y a 70 ans environ, une poignée d’irréductibles gaulois, a imaginé l’anti précarité… Quel regard auraient-ils aujourd’hui sur la précarité de ceux qui continuent à gérer l’anti précarité qu’ils ont rêvée et mise en place dans l’intérêt commun ?